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Future PAC : quel développement des plantes riches en protéines ?

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Un soutien renforcé aux plantes fixatrices d’azote est mise En place : quelle sera son efficacité ?

Une nouvelle stratégie nationale protéines végétales est privilégiée. Les plantes riches en protéines ont été soutenues depuis longtemps par les pouvoirs publics, notamment depuis 2010 avec une prime spécifique.

 

 

 

Un soutien renforcé dans la PAC 2023-27

La France dans son projet de Plan Stratégique National (PSN) poursuit les efforts engagés sur le développement de la filière protéines végétales. Pour cela, elle augmente le volume des aides couplées qui vont passer de 2 % du budget du premier pilier en 2022 à 3,5% en 2027, soit 230 millions par an. Les aides couplées protéines végétales sont aussi ouvertes aux légumes secs et aux mélanges légumineuses graminées dès lors que la légumineuse est prépondérante en année d’implantation.

Par ailleurs, la création d’un programme opérationnel (PO) dédié est envisagé. Ce dernier ne se mettrait en place qu’à partir de 2024 et se verrait alloué un budget de près de 20 millions d’euros. D’ici là il s’agira pour la filière de mettre en œuvre les outils nécessaires : créer des Organisations de Producteurs (OP) voire des Associations d’OP, proposer un plan d’action (Programme Opérationnel).

Le PSN prévoit une augmentation significative des surfaces recevant les primes : +52%. Le montant des aides pourra être augmenté de 30% au maximum si la surface ne s’accroît pas.

Écorégime : un encouragement aux plantes fixatrices d’azote

Dans la future PAC, les écorégimes remplaceront le paiement vert. L’écorégime permettra de recevoir des aides de 2 niveaux : entre 60€/ha et 82€/ha. Parmi les 3 voies possibles, la plus suivie sera sans doute la voie des pratiques agroécologiques. Dans ces pratiques, sur les labours, une exigence de diversité de l’assolement est posée.

Dans cette diversité de l’assolement, les plantes fixatrices d’azote (légumineuses et protéagineux) bénéficient d’un régime de faveur puisque un seuil de 5% des terres arables (labours) est suffisant pour obtenir 2 points dans le barème. Ce seuil est même de 5 hectares seulement pour les exploitations de plus de 100 hectares de labours. Quel sera l’effet de cette voie de l’écorégime sur la surface globale en légumineuses ? Probablement favorable, mais il est encore difficile de chiffrer précisément cet effet.

Luzerne et trèfle trouvent leur place dans les élevages

Luzerne et trèfles retrouvent leur place, au début des années 2010 moins de 2 000 hectares étaient cultivées en légumineuses fourragères pures. La PAC, à partir de 2015, a redonné de l’intérêt à la culture avec l’obtention d’une prime (160 et 250 euros par hectare) dont les modalités ont un peu varié entre 2015 et 2020. La surface primée atteint maintenant 16 000 hectares (hors luzerne déshydratée).

Depuis plusieurs années, le prix du tourteau de soja est très élevé, principalement en raison des achats massifs de la Chine sur les marchés internationaux. Ce qui a poussé les éleveurs normands à limiter les achats et à se rapprocher de l’autonomie protéique. La multiplication des filières sans OGM, surtout en production laitière, a incité les éleveurs à produite des légumineuses. Le tourteau de soja non-OGM devenant de plus en plus rare et de plus en plus cher.

Un bénéfice agronomique certain dans les rotations

L’introduction de protéagineux dans une rotation produit un arrière-effet intéressant sur la culture suivante : on mesure couramment un bonus de 7 à 8 quintaux sur un blé après luzerne. Mais, ce reliquat azoté important doit pouvoir être valorisé par la culture suivante, sinon il est lessivé.

Par ailleurs, féveroles, pois ou colza nécessitent des traitements phytosanitaires assez élevés pour la protection contre les maladies du feuillage et les insectes. Colza ou pois ont un Indice de Fréquence de Traitement (IFT) un peu supérieur à 5, comparable au blé.

Des initiatives pour les protéines en Normandie

Plusieurs initiatives ont été lancées ces derniers mois en Normandie, par des acteurs privés et publics. On peut citer:

  • les programmes de test de la culture de soja ;
  • l’investissement du groupe Avril à Dieppe pour transformer des protéines de colza pour l’alimentation humaine,
  • la création de LEGGO démarche territoriale pour développer et structurer les filières des protéines végétales ; 
  • le GIEE « développement des  légumineuses en Normandie », qui regroupe une trentaine d’éleveurs soucieux de développer la culture des luzernes, trèfles et méteils.

 Plusieurs de ces acteurs seront présents le 14 octobre lors de la Rencontre Économie et Marchés pour débattre, lors d’une table ronde, du développement des cultures riches en protéines en Normandie.

 

Philippe LEGRAIN, Économie, veille et prospective, Chambres d’agriculture de Normandie

 

En savoir plus sur les protéagineux

Quelles surfaces de cultures protéiques  aujourd’hui en Normandie ?

Le colza est l’élément essentiel dans la recherche de l’autonomie protéique de la région normande. L’extraction d’huile a la particularité de donner comme coproduit, un tourteau d’excellente qualité, très bien utilisé par les animaux d’élevage, même si le taux de protéines (33%) est plus faible que le tourteau de soja (45%). Le pressage du colza peut être utilisé comme huile ou au diester.

 La surface de pois, féverole ou luzerne est 10 fois plus faible que celle du le colza.  Avec les autres plantes riches en protéines expérimentales en Normandie : soja, lentille, lupin un facteur 100 existe par rapport au colza.

Les oléagineux occupent 6% de la surface agricole de la Normandie. Depuis 2015, un recul de la surface de colza de 8% a été observé, compensé par un doublement de la surface en luzerne et trèfle. Et un recul de 26% des protéagineux (pois, féveroles). L’évolution France a été similaire, sauf en protéagineux où le recul a été moindre.

Évolution des surfaces des plantes protéines en Normandie

 

 

Une rentabilité insuffisante des protéagineux

Produit moyen par hectare des oléoprotéagineux et du blé en Normandie

En Normandie, le prix payé départ ferme des protéagineux est 40% plus bas que celui des oléagineux et pas très loin de celui du blé. En Normandie, ces 10 dernières années, le rendement des céréales se maintient, alors que celui de tous les oléoprotéagineux est tendanciellement en baisse (-17% pour le colza, -25% pour les protéagineux), ce qui accentue encore leur manque d’intérêt par rapport aux céréales.

Blé et colza dégagent un produit de la vente de 1 100 euros par hectare en moyenne régionale ces 5 dernières années. Les protéagineux, pois-féverole et même soja dégagent un produit de vente de 560 euros. Soja et tournesol 750-800 euros.

 Les charges opérationnelles sont peu différentes selon les cultures : autour de 500-550 euros en blé et colza et 400-450 euros pour pois et féveroles. Les charges en produits phytosanitaires sont équivalentes selon les cultures. Blé, colza ou pois ont un Indice de Fréquence de traitement un peu supérieur à 5 (source Agreste-enquête 2017). On voit que la prime aux protéagineux est donc totalement insuffisante pour combler la différence de produit. Elle devrait s’élever à 450 euros environ, alors qu’elle est prévue proche de 100 euros par hectare.