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Multi-performances et réduction d’usage des produits phytosanitaires : les retours d’expérience des groupes DEPHY normands

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Le binage du maïs décortiqué par les groupes DEPHY du Sud de la Manche dans le secteur de Vessey, avec les étudiants de la MFR de Granville

Bilan d’étape pour l’action FERME DEPHY du plan Ecophyto en Normandie après plusieurs années de travaux des groupes d’agriculteurs engagés

Si les produits phytosanitaires restent dans certains cas nécessaires pour garantir la qualité sanitaire des productions, leurs usages sont de plus en plus remis en question. La dégradation de la biodiversité et les molécules actives retrouvées dans les nappes d’eau, dont certaines servent à l’alimentation en eau potable, alertent aussi bien les scientifiques, que les agences de santé, les pouvoirs publics ou la société en générale.

Au même titre que « les antibiotiques ce n’est pas automatique », un réseau d’agriculteurs normands teste sur leurs exploitations, et depuis plusieurs années, différentes manières de faire évoluer leurs pratiques et ainsi d’améliorer leurs performances globales.

 

Des motivations différentes mais un même objectif

Qu’ils s’appellent Aubert, Ludovic, Joël, Jean-Luc, Eric, Antoine, Olivier ou Dominique et qu’ils viennent de l'Avranchin dans le Sud Manche, du Bessin Calvadosien, du Bocage Ornais, de l’Eure, ou encore du Pays de Caux ou du Pays de Bray en Seine Maritime, ils ont tous le même objectif d’adapter leurs pratiques pour traiter moins leurs cultures. Pour certains, cela se concrétise par une utilisation des produits phytosanitaires uniquement en tout dernier recours, lorsque toutes les alternatives mobilisées au préalable n’ont pas permis de gérer suffisamment les bioagresseurs de la parcelle.

Leurs motivations peuvent diverger. Pour plusieurs, la raison première qui les incite à remettre en cause leurs pratiques est économique : « ce que je ne dépense pas reste dans mon portefeuille » témoigne l’un d’eux. Pour d’autres c’est une façon de préserver sa santé et les auxiliaires des cultures : « moins je traite et mieux je me porte ! Et c’est également le cas dans mes parcelles. Moi qui ai choisi ce métier parce j’aime le vivant, c’est une grande satisfaction de voir que mes champs regorgent de vie depuis que je suis plus économe en intrants » ajoute un autre.

 

8 groupes d’agriculteurs mobilisés en Normandie

Ils sont presque une centaine d’agriculteurs à avoir rejoint les 8 groupes FERME DEPHY normands dont les objectifs sont de tester des alternatives aux phytos, les éprouver dans des contextes de production et d’exploitation réelles et de rendre accessibles les connaissances et les expériences acquises au bénéfice du plus grand nombre.

Pour plus d'informations, n'hésitez pas à contacter les animateurs de ces groupes de progrès

 

Action majeure du plan Ecophyto, les groupes DEPHY ont émergé en 2010. Ils se sont progressivement déployés en Normandie, mais aussi partout en France, couvrant toutes les filières de productions végétales françaises : grandes cultures, polyculture-élevage, arboriculture, horticulture, légumes de plein champs ou maraîchage, viticulture jusqu’aux cultures tropicales dans les DOM.

 

Le groupe pour sortir des sentiers battus

Pour les agriculteurs, l'intérêt principal de cette démarche de groupe peut se résumer avec l’adage « l’union fait la force ».

Pourquoi ? Car s’unir en groupe, c’est une façon de se donner ENSEMBLE les moyens d’oser ce qu’on n’aurait jamais fait seul et ainsi de sortir des sentiers battus.
 

Lorsqu’ils s’expriment sur la démarche de groupe, tous mentionnent les bienfaits des échanges dans un esprit d’ouverture et de convivialité, de pouvoir se comparer, d’exprimer les difficultés que chacun rencontre et de bénéficier du retour d’expériences des uns et des autres. Ce partage permet de requestionner ses façons de faire et incite par la même occasion à devenir acteur dans la recherche de ses propres solutions.
 

« Pour ma part, ce que je cherche avec le groupe DEPHY, c’est aussi d’être bousculé dans mes habitudes de travail, car c’est un challenge de réussir à baisser ses IFT. Certaines années sont très propices à la baisse des fongicides et des insecticides. Pour les herbicides, c’est plus difficile dans le long terme. Bien évidemment, il n’y a pas de solution miracle, mais on avance progressivement en remettant de l’agronomie dans nos systèmes », témoigne l’un d’eux.

 

Une panoplie de leviers à combiner

Pour réduire les IFT, la meilleure arme à disposition repose sur la mobilisation de l’agronomie dans les systèmes d’exploitation. Depuis plusieurs années, la recherche agricole a mis en lumière différents types de moyens alternatifs pour lutter contre les maladies, les ravageurs ou les adventices.

Le choix de la rotation est un exemple. Ce levier est d’autant efficace qu’elle est longue et diversifiée. Elle permet en effet d’améliorer la fertilité des sols, de limiter l’enherbement, de réduire le stock semencier et la spécialisation de la flore adventice, des champignons et des ravageurs dans les parcelles.

D’autres solutions comme le travail du sol, l’utilisation de variétés résistantes aux maladies, le décalage des dates de semis, l'association de variétés ou d’espèces ont également fait leurs preuves.

Exemple des leviers travaillés dans le groupe DEPHY du Bessin en polyculture-élevage

 

Il faut retenir que s’il existe un panel de méthodes de protection alternative des cultures, il n’existe pas de méthode qui, utilisée seule, possède une efficacité égale à celle des produits phytosanitaires. Elaborer une stratégie de protection des cultures économes en phytos consiste à combiner différentes méthodes de lutte à efficacité partielle, agissant en amont de l’élaboration du dégât pour limiter les pertes économiques dues aux bioagresseurs. Guide STEPHY (STratégies de protection des cultures Économes en produits PHYtosanitaires) - 2011 - page 37.

 

Semer des idées et inspirer

La communication et le transfert des acquis et des expériences des groupes DEPHY vers le plus grand nombre d’acteurs font également partie des objectifs suivis. La valorisation des techniques et des systèmes économes et performants vise à inspirer d’autres exploitants, futurs agriculteurs, conseillers, animateurs de groupes territoriaux, constructeurs de matériels, chercheurs etc…
 

Pour cela les groupes organisent diverses actions de communication ou de démonstrations, se mobilisent lors de salons, réalisent différents types de supports ou interviennent au sein des territoires, notamment dans les bassins d’alimentation de captage en eau potable ou encore auprès des enseignants et des étudiants des établissements d’enseignement locaux.

En effet, les travaux avec les collectifs d’agriculteurs sont un formidable outil d’apprentissage pour les étudiants en parcours de formation agricole. C’est pour eux l’occasion de comprendre et de voir concrètement comment agir sur ses propres pratiques quand on conduit une exploitation. Ces travaux avec les groupes sont autant d’exemples qu’ils peuvent remmener avec eux, au sein même de l’exploitation familiale ou de celle du maître d’apprentissage.