Le labour et le travail du sol sont des leviers de gestion de la flore adventice. La mise en œuvre de l’agriculture de conservation réduit voire empêche l’utilisation de ces leviers.
Le désherbage mécanique n’est pas non plus possible dans la majorité des situations en AC. L’AC repose donc sur d’autres techniques pour maîtriser la flore adventice.
L’utilisation de désherbants est un levier efficace mais qui nécessite une maîtrise accrue.
Les autres leviers tels que la diversité des espèces cultivées se succédant dans des rotations, l’utilisation de couverts végétaux permettent de compenser dans une certaine mesure la réduction ou l’absence de travail du sol.
Le travail du sol peut également venir exceptionnellement ou régulièrement lever une impasse de désherbage.
Les mauvaises herbes majoritaires sur une parcelle sont le fruit d’une adaptation à ce qui a été fait sur la parcelle ainsi qu’au climat.
On a donc les mauvaises herbes qu’on mérite ! L’idée est alors de faire en sorte de modifier le plus possible leur environnement.
La rotation des cultures a un impact important. D’une part, les espèces cultivées n’ont pas la même pression de concurrence vis-à-vis des adventices. Leurs dates de semis, de récolte ainsi que les modes de récolte diffèrent.
Enfin, les molécules herbicides utilisées sur les différentes cultures ont des cibles et modes d’action différents. Afin de renforcer la pression contre les mauvaises herbes, il convient aussi de mettre en œuvre des couverts temporaires ou permanents.
Attention cependant car certaines adventices se plaisent dans un environnement ombragé et ont parfois le temps de se multiplier à l’intérieur même d’un couvert ou d’une culture (pâturin, séneçon, agrostis).
Ici, on peut voir qu’un couvert bien développé a un pouvoir concurrentiel élevé mais pas suffisant pour détruire toutes les mauvaises herbes :
Le couvert composé majoritairement de féverole et de seigle capte une grande partie des nutriments du sol et du rayonnement solaire.
Ces derniers sont plus difficiles d’accès aux adventices qui se développent pas ou peu.
Après un semis direct dans ce même couvert, une partie des adventices présente démarre après le semis du maïs en direct avec roulage du couvert.
Si le couvert a eu une certaine efficacité sur le développement des adventices, celle-ci ne sera pas suffisante et il faudra intervenir avec un désherbant total avant la levée ou adapter le désherbage chimique du maïs pour contrôler les adventices.
Sans labour, certaines adventices apparaissent et peuvent devenir envahissantes en peu de temps car elles passent à côté des programmes de désherbage classiques (bromes).
Souvent bien gérées par un labour systématique ou 1 an sur 2 ou 3 ce sont les adventices qui ont un fort taux annuel de décroissance (TAD).
Certaines adventices développent également des résistances aux herbicides (ray-grass, séneçons…), cela peut aller d’autant plus vite qu’un seul mode de gestion est disponible en ACS : le désherbage chimique.
L’adaptation des programmes de désherbage doit permettre de cibler les adventices avec un fort TAD en plus des autres.
Une surveillance des parcelles, de façon régulière, est indispensable pour éviter de laisser se multiplier ces espèces indésirables et anticiper les futures actions de contrôle (choix des herbicides ou modification de la rotation voire travail du sol occasionnel).
Un couvert végétal qui serait envahi d’adventices à risque de multiplication peut-être broyé afin de casser le cycle des adventices.
► En savoir +
Plusieurs essais “désherbage chimique” ont été réalisés. Il en ressort que sans glyphosate, la gestion des adventices nécessite une utilisation des autres produits phytosanitaires plus importante. Cela se traduit par des IFT plus élevés.
Des tentatives de désherbage mécanique ont été réalisées mais sans succès pour cause de présence trop importante de résidus de culture. On peut en conclure que les outils de désherbage mécanique disponibles sont adaptés pour fonctionner sur des sols travaillés et en dehors de la présence de résidus de culture.
Des pistes existent mais restent à explorer sur le désherbage chimique localisé en agriculture de précision.
Le couvert végétal peut être un allié de choix, nos mesures montrent que plus le couvert est développé, moins les adventices le sont.
Les enquêtes réalisées auprès d’agriculteurs dans le cadre du projet CAPISOL font ressortir un certain nombre de problématiques en lien avec les adventices. Il ressort que les adventices les plus problématiques sont des graminées et/ou des vivaces. Parmi les graminées on peut citer le ray-grass, le vulpin, la folle avoine et le chiendent. Parmi les dicotylédones vivaces, on peut citer le rumex, le chardon et le liseron.
Ces mêmes enquêtes font ressortir un certain nombre de leviers mis en place pour gérer les adventices et de pratiques permettant de réduire la pression. La mise en place d’une rotation diversifiée et des couverts permanents sont les solutions les plus citées.
Viennent ensuite la mise en place de prairie et de cultures dérobées dans la rotation. Enfin, la mise en place de certaines cultures semble réduire la pression adventices : colza associé, sarrasin, chanvre et méteil.
L’allongement des rotations en système céréalier est un pilier fondamental de l’agriculture de conservation. Son intérêt est essentiel pour assurer une implantation correcte et une bonne alimentation notamment azotée des cultures mais surtout pour la gestion du salissement des parcelles. La rotation est d’autant plus importante qu’en l’absence de labour ou de désherbage mécanique, les solutions curatives se limitent au désherbage chimique.
Sur le second point (limitation du salissement), l’alternance des périodes de semis, la possibilité d’utilisation de modes d’actions herbicides différents, la possibilité de désherber plus facilement certaines adventices dans certaines cultures ou encore l’effet étouffant et/ou allélopathique de certaines cultures permet de gérer différemment les adventices et d’éviter une spécialisation préjudiciable lorsque les populations d’adventices deviennent importantes.
L’usage du glyphosate au sein des systèmes en agriculture de conservation est parfois inévitable car il reste aujourd’hui la méthode curative présentant le meilleur rapport coût/efficacité en l’absence de travail du sol.
De la même façon que dans les autres systèmes d’agriculture ayant conservé une intensité de travail du sol plus ou moins forte, le glyphosate permet de détruire les adventices présentes au moment de l’application et au plus proche du semis sans travail du sol qui aurait pour effet :
i) d’entrainer la levée d’adventices de façon concomittante à la levée des cultures,
ii) d’assécher le sol (conditions limitantes en eau) ou au contraire
iii) d'entraîner une dégradation du sol : lissage, localisation de zones de compaction ou formation de mottes (sols argileux en sortie d’hiver ou semis d’automne par exemple).
En plus d’être difficilement mobilisable dans les systèmes en agriculture de conservation des sols (présence de résidus, semis direct), le recours au désherbage mécanique comme alternative au glyphosate ne présente pas toujours le même niveau d’efficacité (en fonction des adventices cibles, du matériel utilisé et des périodes d’interventions).
Anthony Page, Conseiller Occitanie