Agriculture biologique
Dernière mise à jour le 25 novembre 2024
Les Chambres d’agriculture de Normandie ont organisé une journée sur les filières bio qui fut l’occasion de faire le point avec des acteurs de l’aval. Pour ce 3e témoignage, on fait le point avec Eric Juttin, Directeur des Marchés Publics chez Pomona.
Pomona est distributeur de produits alimentaires auprès des professionnels des métiers de bouche. C’est un fournisseur décisif de produits biologiques dans la restauration collective.
Entretien avec Eric Juttin, directeur des Marchés Publics.
Au menu : quels leviers pour dépasser les 7 % et atteindre les 20 % de produits bio dans ce secteur ?
On voit peu votre entreprise, pourtant de grande taille ! Vos transporteurs sont présents tous les jours sur les routes de France. Quels sont les grands traits de Pomona ?
Eric Juttin : « En effet, nos camions roulent tôt le matin et on ne les voit pas toujours ! Notre groupe est 100 % français et réalise un chiffre d’affaires annuel de 5,3 milliards €. Nous disposons de 190 sites en France et en Espagne dont les noms sont ceux de nos 7 branches. Elles jouent le rôle de grossiste-distributeur. Vous trouverez Relais d’Or à Bayeux, TerreAzur à Maromme… en tout 8 sites en Normandie pouvant s’appeler Passion Froid, Episaveurs, Saveurs d’Antoine ou Délice&Création autour des villes d’Argentan, Avranches, Cherbourg, Caen, Rouen… Et nous avons aussi notre filiale Biofinesse qui est spécialisée dans la distribution de produits bio ».
Qui sont les clients que vous approvisionnez en denrées alimentaires ?
EJ : « Nous distribuons des produits alimentaires chez 3 grandes catégories de professionnels. D’abord dans la restauration commerciale, ce sont les restaurants, les brasseries, les traiteurs, les hôtels. Ensuite dans la restauration collective : les hôpitaux, les écoles, les prisons, les maisons de retraite. Et enfin dans les commerces alimentaires spécialisés : des boulangeries, des boucheries charcuteries, des primeurs, des poissonniers… ».
Quels types de produits passent entre vos mains ?
EJ : « C’est très diversifié ! Tout ce dont nos clients ont besoin ! Du frais ou du surgelé, des légumes ou du poisson, des produits laitiers ou de la viande, des produits bruts (par exemple des haricots en caisse) ou transformés (des mélanges de légumes). Nous disposons de plus de 6 000 références en moyenne par activité dont près de la moitié sont régionales. Ainsi, nous nous approvisionnons auprès de faiseurs régionaux et locaux comme auprès de grands groupes agroalimentaires afin d’avoir les volumes suffisants ».
Quelle est la part de produits bio dans les commandes de Pomona ?
EJ : « Selon les familles de produits, la lecture sera différente. Dans celle des fruits et légumes, la part du bio peut atteindre 25 à 30 % chez certains clients. Dans celle de la viande c’est souvent inférieur. Dans celle des produits laitiers : parfois près de 15 %. Notre filiale Biofinesse (100 % produits bio) n’est pas la seule à distribuer des produits bio. Elle a bien grossi et s’adresse à des clients de différentes tailles, souvent des collectivités. Il y a aussi des gammes de produits bio distribués par d’autres filiales qui sont plus en relation avec des grosses structures comme les hôpitaux ».
Quelles évolutions récentes percevez-vous des produits bio dans vos activités ?
EJ : « Depuis les annonces en décembre 2023 du Ministre de l’agriculture en réaction à la crise de l’AB, je ressens sur 2024 un maintien et parfois même une progression des commandes de produits bio dans la Restauration Hors Domicile, mais je ne les ai pas encore quantifiées car ce sont uniquement des engagements d’achats présents dans les cahiers des charges de nos clients, et nous savons qu’il existe aussi des soucis de budges chez certains ».
A votre avis, comment la part du bio dans la restauration collective peut-elle atteindre les 20 % affichés par EGAlim ?
EJ : « Ce qui est sûr, c’est que l’appel d’offre de la collectivité doit contenir la mention des 20 % de produits bio. C’est la volonté de la collectivité et sa manière de rédiger son cahier des charges pour l’appel d’offre qui vont peser, et non l’injonction d’EGAlim ! Du côté de Pomona, quand nous rencontrons une mairie, nous pouvons lui proposer notre gamme bio, mais si son cahier des charges ne mentionne pas la nécessité de commander des produits bio, ce sera plus difficile de les faire rentrer dans la passation de commande. Je tiens aussi à mentionner l’enveloppe sous-utilisée du programme européen « Lait et Fruits à l’Ecole ». Seuls 7 millions € sur 35 sont consommés en France. Cette enveloppe gérée par FranceAgriMer permet de rendre compétitifs les produits bio non transformés (fruits, légumes, lait et produits laitiers) dans les établissements de la maternelle à la terminale ».
Comment fonctionnent d’éventuels clients exemplaires, avec une forte introduction de produits bio dans leurs commandes ?
EJ : « Encore une fois, c’est la rédaction du cahier de charges qui fait le poids des produits bio dans les commandes. La part « matière » dans un repas représente 2,25 à 3 € en moyenne / par personne. Cette matière peut être AB sans surcoût en utilisant des produits AB bruts plutôt que transformés, ce qui implique aussi un programme de formation du personnel des cuisines ».