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La conduite d’un verger cidricole basse-tige en arboriculture biologique

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L’arboriculture cidricole se distingue de la pomme de table par ses variétés. Elles sont riches en polyphénols (tanins) et ont un caractère d’acidité plus ou moins marqué. Elles sont moins sensibles aux ravageurs et maladies mais sont très florifères, et donc sensibles au phénomène d’alternance de production une année sur deux.

Les thématiques importantes en verger cidricole AB : différences selon conversion ou conception

 

 

Réflexion avant plantation

Pour la réussite d’un verger cidricole conduit en Bio, il faut dès sa conception avoir une réflexion d’ensemble et utiliser des leviers agronomiques de base, comme le choix variétal et du porte-greffe. On évitera les variétés les plus sensibles aux ravageurs et maladies, notamment la tavelure, et les variétés les plus alternantes. Il faudra opter pour un porte-greffe suffisamment vigoureux, en bonne adéquation avec la croissance connue de la variété pour optimiser le volume de l’arbre et assumer la concurrence de l’enherbement à l’âge adulte. Les distances de plantations sont aussi à bien penser pour favoriser des vergers aérés tout en ne compromettant pas la productivité/hectare. L’environnement parcellaire est également à considérer. Il influe directement l’installation durable d’une biodiversité fonctionnelle contributrice à la régulation des bio-agresseurs. La présence de haies, la pose de nichoirs, une diversité floristique au travers du semis d’espèces fleuries sont autant d’éléments qui peuvent participer à cet enrichissement utile du milieu. Ces leviers mis à part, on dispose aussi de solutions d’interventions directes et efficaces pour garantir une bonne protection sanitaire.
 

Figure 1: Bande fleurie composée de nombreuses espèces

Possibilités et raisonnement de la lutte tavelure en bio

La tavelure est une des principales maladies du pommier. L’intensité de contamination de la tavelure est influencée par la sensibilité variétale, l’inoculum présent dans la parcelle et les conditions climatiques. En s’appuyant sur l’OAD (Outil d’Aide à la Décision) Rimpro, des travaux récents ont permis de proposer une grille de décision en dessous desquels il n’est pas utile d’intervenir (seuil RIM).


 
Pour les quelques traitements néanmoins indispensables, entre le 1er avril et le 15 juin, des résultats tout aussi bons qu’en protection conventionnelle, sont obtenus avec des produits à effet préventif mais également curatif, autorisés au cahier des charges AB.

Entretien du rang

Le problème majeur en jeune verger bio est la gestion de l’enherbement sur le rang. Lors des premières années, il est important que l’arbre se développe au maximum afin de construire son volume et ainsi d’optimiser sa future production. Différentes solutions techniques ont été expérimentées. Les résultats ont clairement démontré que l’enherbement à la plantation était à proscrire au moins jusqu’à la 3ème ou 4ème feuille, car trop concurrentiel (voir graphique). 


  
Il entraîne un retard dans la production, toujours visible des années plus tard.  Les couverts testés de type mulchs et bâches tissées limitent cette concurrence mais ont des inconvénients et contraintes : coût, gestion de l’enlèvement/dégradation. Ces dernières années, avec le développement de nombreuses jeunes plantations en AB et les aides financières possibles, c’est le plus souvent l’équipement en outil de travail du sol qui a été retenu. Chaque matériel a ses qualités et défauts mais la solution donne dans tous les cas satisfaction.

Gestion de la régularité de production

La succession de très fortes et faibles productions n’est pas une fatalité que l’on doit subir et contre laquelle rien n’est possible. Pour l’atténuer, il faut limiter le nombre de fruits l’année où il est en excès. Contrairement à la production conventionnelle, il n’y a pas de produits homologués pour usage d’éclaircissage actuellement en AB. Il y a par contre les approches mécaniques. Les deux pistes ont été étudiées. Des résultats positifs ont été obtenus, mais pas toujours de façon systématique. Ils peuvent s’expliquer par les variétés très fructifères travaillées dans ces essais et donc plus difficiles à réguler :

  • parmi les produits testés, la bouillie sulfo-calcique est le seul présentant un intérêt potentiel et des perspectives. Il s’agit d’un produit autorisé en AB sur tavelure. C’est au travers de son effet dessicant sur fleur et de stress végétatif qu’il agit.
  • les approches mécaniques pour éliminer des bourgeons à fleur ou faire chuter des jeunes fruits. Le secouage des arbres au stade jeunes fruits a démontré une efficacité, mais aléatoire et non reproductible selon les années et variétés. Aucune autre méthode mécanique testée n’a montré d’action supérieure et suffisante.

La solution la plus pertinente aujourd’hui pour une production plus régulière serait de combiner des interventions autour de la floraison et en post-floraison avec le secouage des petits fruits. Ces techniques doivent continuer à être travaillées pour apporter des résultats plus constants.


En conclusion, la Chambre d’Agriculture de Normandie réalise des expérimentations (*) depuis une quinzaine d’années afin d’acquérir des références et apporter des réponses aux problèmes techniques rencontrés en verger cidricole AB, et aussi de se préparer à une évolution des systèmes en production conventionnelle, notamment en termes de diminution de l’usage des produits phytosanitaires. 
Des réponses ont été apportées pour les thématiques abordées ici mais bien d’autres ont été travaillées et seront présentées lors du Tech&Bio.

Marion Décultot / Nathalie Corroyer / Jean-Charles Cardon / Chambre d’Agriculture de Normandie

Un grand remerciement aux producteur.rice.s qui ont activement contribué aux essais.


(*) programmes d’expérimentations réalisés avec le concours financier de France Agrimer et des fonds Casdar ainsi que la région Normandie, l’Office Français de la Biodiversité et l’Agence de l’Eau Seine Normandie